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Les chrétiens du Moyen-Orient : une présence millénaire, une contribution essentielle

Jean Fahmy est un écrivain franco-ontarien. Il a publié dix romans et de nombreux essais et articles. Ses romans ont été récompensés par de nombreux prix, dont le Prix Trillium, le Prix du Livre d’Ottawa,  le Prix des Lecteurs Radio-Canada et le Prix France-Acadie.

Jean est né en Égypte dans une famille chrétienne et s’intéresse depuis toujours à l’histoire et à la situation des chrétiens du Moyen-Orient, qui traversent à l’heure actuelle une période particulièrement difficile. C’est pourquoi il a écrit un essai, intitulé Chrétiens d’Orient, le courage et la foi, qui a été publié en 2015 aux Éditions Médiapaul. On peut se le procurer dans toutes les bonnes librairies, ou en contactant les Éditions Médiapaul à Montréal.  CNEWA Canada est heureux de pouvoir compter sur sa collaboration.

Le Moyen-Orient dans le tourbillon

Depuis plus d’une dizaine d’années, le Moyen-Orient vit dans un tourbillon continuel. Tourbillon politique, à la suite du printemps arabe qui a mené à la chute de certains dictateurs, tourbillon militaire avec les guerres en Syrie et au Yémen qui n’en finissent plus de causer la mort de milliers d’innocents, tourbillon sectaire avec l’émergence de nouveaux fanatismes. Certaines de ces dérives sont mentionnées et analysées par les médias occidentaux, mais un autre tourbillon est passé sous silence et est tranquillement ignoré par les opinons publiques du monde, et ici même au Canada. Il s’agit du sort réservé aux minorités chrétiennes des pays arabes du Moyen-Orient.

Des chrétiens au Moyen-Orient ? Des chrétiens arabes ?

Minorités chrétiennes au Moyen-Orient, dites-vous ? Oui, il y a des chrétiens arabes, des chrétiens quelquefois persécutés, des chrétiens dont l’avenir devrait nous interpeller, non pas seulement pour eux, mais aussi pour nous, pour la marche vers un monde plus juste.

Il y a quelques années, un événement important pour le christianisme s’est déroulé au Moyen-Orient. En effet, les patriarches catholiques d’Orient s’étaient réunis au Liban pour débattre de l’avenir de leurs Églises et du christianisme au Moyen-Orient arabe. Dans leur communiqué final, les patriarches ont rappelé que les chrétiens sont présents au Moyen-Orient « depuis 2000 ans » et qu’ils contribuent à « l’essor économique, social et culturel » de cette région. Ils ont insisté sur « l’impératif de séparer l’État et la religion …, afin que les chrétiens soient confortés dans leur qualité de citoyens ayant leurs pleins droits ». Ils ont enfin exprimé leurs inquiétudes pour l’avenir des communautés chrétiennes d’Orient.

Le sort de ces chrétiens d’Orient, qui prient Jésus en arabe, sinon leur existence même, sont donc ignorés de la grande majorité des Occidentaux. Ils sont aujourd’hui l’objet d’une persécution, quelquefois ouverte, souvent larvée, et les actualités qui nous dévoilent peu à peu leurs tribulations ne nous permettent plus le confort de l’ignorance.

Mais qui sont donc ces chrétiens dont les chefs spirituels portent le poids de leur avenir, sinon de leur survie même dans ce coin du monde ? Quel est le rôle de leurs communautés dans l’histoire de l’Église? Et quel est leur sort actuel ?

J’évoquerai dans une succession d’articles le sort des chrétiens arabophones, c’est-à-dire ceux d’Irak, de Syrie, du Liban, de la Jordanie, de la Palestine, d’Israël et d’Égypte.

L’Histoire et le passé des chrétiens du Moyen-Orient  

Ces chrétiens arabes prient aujourd’hui dans des langues dont certaines remontent au temps de Jésus et des apôtres. Ils sont enracinés dans leurs pays depuis deux millénaires.

Faut-il rappeler que Jésus est né, a vécu et est mort au Moyen-Orient ? Faut-il rappeler que Pierre, et Paul, et Jacques, et tous les autres, étaient des « Moyen-Orientaux », pour reprendre notre terminologie d’aujourd’hui ?

Voyons donc : si nous devions utiliser le vocabulaire actuel, saint Augustin et saint Cyprien seraient tunisiens. Saint Athanase, saint Cyrille, saint Pacôme, sainte Catherine d’Alexandrie, saint Antoine le Grand, saint Paul l’Ermite seraient « coptes ». Saint Ignace d’Antioche, saint Jean Chrysostome, saint Jean Damascène seraient « syriens ». Saint Basile le Grand et saint Grégoire de Nysse seraient « turcs ».

L’histoire des chrétiens d’Orient a donc commencé au lendemain même de la Résurrection du Christ. Elle a été glorieuse, car les évêques et les théologiens orientaux ont été les acteurs essentiels du développement du christianisme, au cours des quatre ou cinq premiers siècles qui suivirent la mort du Christ.

Leur apport a été fondamental : les évêques, les saints et les penseurs de l’Orient ont diffusé la nouvelle foi et l’ont définie dans un corps de doctrine qui est encore le nôtre. Ainsi, à simple titre d’exemple, la première ébauche de notre Credo actuel, le « Je crois en Dieu…» que nous récitons dans nos célébrations, a été rédigée par un Égyptien, saint Athanase.

Ces chrétiens orientaux, brûlant de foi, ont aussi accepté le sacrifice ultime de leur vie, offerte au Christ. La liste des martyrs de cette époque, notamment pendant les persécutions des empereurs romains, est bouleversante.

Les chrétiens orientaux des premiers siècles ont également créé les structures de l’Église, et ont défini les rôles et les charismes particuliers des évêques, des prêtres et des diacres.

Des institutions essentielles du christianisme sont nées dans l’Orient antique. J’en mentionnerais simplement deux : l’érémitisme (la vie des moines dans la solitude presque totale) est le don donné à l’Église par Saint-Antoine le Grand, né dans un village de Haute-Égypte au 4è siècle, tandis que saint Pacôme, un autre Égyptien (né près de Louxor) a été le créateur de la vie monacale en communauté. Il en a ainsi codifié les règles principales : pauvreté, chasteté et obéissance.

Cette structure dure encore deux millénaires plus tard. Et puis, quand l’Islam a conquis l’Orient, ces saints orientaux ont passé le relai aux penseurs et aux théologiens de l’Occident.

Le christianisme est menacé au Moyen-Orient

Un millénaire et demi plus tard, le christianisme d’Orient est pourtant acculé dans ses derniers retranchements. Les enfants d’Athanase ou de Jean Chrysostome vivent une Passion qui est ignorée de beaucoup. Que s’est-il donc passé?

Une scène terrible introduira ce nouveau chapitre de leur histoire. Il s’agit de la décapitation, en 2015, de jeunes hommes coptes, c’est-à-dire de chrétiens égyptiens.

Le lendemain, le Pape François a téléphoné au patriarche copte-orthodoxe Tawadros II pour « manifester sa profonde participation à la douleur de l’Église copte, après le récent assassinat barbare de chrétiens coptes par des fondamentalistes islamistes ».

La décapitation de ces 21 coptes sur une plage libyenne par des affiliés de l’État islamique, qui avait horrifié le monde entier, n’est qu’un des chapitres – un des plus spectaculaires, il est vrai – du sort de nombreuses communautés chrétiennes d’Orient depuis près de cent ans. Certes, la barbarie de ces affidés de l’État islamique est une exception extrême, mais les chrétiens d’Orient subissent aujourd’hui un sort qui va de leur marginalisation bénigne dans leurs sociétés jusqu’à des violences extrêmes exercées contre eux.

Résumons donc les grandes tendances du sort de ces chrétiens :

  • De nombreux monastères et églises, dont certains remontent aux premiers temps de l’Église, sont détruits ou incendiées, et pas seulement dans les territoires saisis par l’État islamique;
  • Des maisons et des commerces appartenant à des chrétiens sont également détruits et les habitants de certains villages ou de certaines régions sont obligés de quitter leurs terres ancestrales par peur pour leur sécurité;
  • Des jeunes filles sont régulièrement kidnappées, converties de force à l’islam et mariées à de parfaits inconnus, notamment en Égypte;
  • Les conversions au christianisme sont frappées d’interdit et peuvent mener à des peines sévères;
  • Les chrétiens jouent de moins en moins de rôles importants dans les institutions des divers États; ils sont écartés de nombreux centres de pouvoir;
  • Pour certains mouvements fondamentalistes extrémistes, tels les salafistes par exemple, l’existence de chrétiens au sein d’une société musulmane est un anachronisme qu’il faut faire disparaître.

Arrêtons là cette triste litanie. Je voudrais signaler par contre que de nombreux musulmans d’Orient sont consternés par la tournure des événements et s’allient à leurs voisins chrétiens pour lutter contre l’influence délétère des Frères musulmans ou des salafistes. Des leaders aussi s’expriment fortement contre cette barbarie : je citerais, à simple titre d’exemple, le président d’Égypte et le roi de Jordanie.

Le pape François et les chrétiens d’Orient

Le sort de ces chrétiens d’Orient, dont j’avais longuement décrit la contribution essentielle à la diffusion de la foi et à la structuration de l’Église, ainsi que les persécutions qu’ils subissent actuellement, dans un essai publié en 2015 chez Médiaspaul sous le titre Chrétiens d’Orient, le courage et la foi, préoccupe de façon très particulière notre pape François, qui n’a cessé de les encourager à rester fermes dans leur foi malgré leurs souffrances.

Ainsi, dans une lettre remarquable qu’il leur adressait il y a quelques années à la veille de Noel, il leur disait :

J’ai pensé à vous écrire, frères chrétiens du Moyen-Orient … à l’approche de Noël, sachant que pour beaucoup d’entre vous, aux chants de Noël se mêleront les larmes et les soupirs … Chers frères et sœurs, qui avec courage rendez témoignage à Jésus en votre terre bénie par le Seigneur, notre consolation et notre espérance c’est le Christ lui-même. Je vous encourage donc à rester attachés à Lui, comme les sarments à la vigne, certains que ni la tribulation, ni l’angoisse, ni la persécution ne peuvent vous séparer de Lui (cf. Rm 8, 35).

Les chrétiens d’Orient ont besoin de notre aide

Ces communautés chrétiennes doivent être connues et surtout ont besoin de notre soutien. D’ailleurs un grand nombre de familles chrétiennes orientales, et notamment des familles syriennes, sont venues chercher refuge au Canada. C’est dans ce contexte difficile que l’Association Catholique d’aide à l’Orient (CNEWA Canada) qui est une association du Saint-Siège mandatée depuis 1926 par le pape pour appuyer les chrétiens de rite oriental, vous invite à être solidaire avec nos frères et sœurs d’Orient.

Dans de prochains articles que publiera CNEWA, nous nous pencherons plus longuement sur la contribution et le sort des différentes communautés chrétiennes des pays du Moyen-Orient.

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